Contribution de M. Abdoulaye CAMARA, enseignant à la FSEG, U-Bazo, ESGIC.
Temps
de lecture : 7 min
La demande de monnaie parlons-en
« La monnaie détenue
par un agent économique est un élément de sa richesse ». Bien que récente
dans l’analyse économique par rapport à d’autres thématiques, puisqu’elle n’est
apparue qu’à la fin du XIXè siècle, la demande de monnaie a toujours
suscité beaucoup d’intérêt. C’est pourquoi elle est à l’origine de nombreux
débats dans la littérature économique. En effet, si les premières théories de
la demande de monnaie n’ont privilégié que la fonction « intermédiaire des
échanges » : la monnaie n’est pas détenue pour elle-même parce
qu’elle n’est utile que pour effectuer des transactions (théorie
quantitative de la monnaie, Ecole de Cambridge). Par contre, pour Keynes,
elle est considérée comme un actif demandé pour plusieurs motifs.
De façon générale, l’ensemble
de ces analyses cherche à étudier les facteurs qui justifient la détention de
monnaie par des agents économiques, et les facteurs qui poussent ceux-ci à
détenir une partie ou la totalité de leurs richesses sous forme liquide ou
monétaire.
Les
fondements de la demande de monnaie
Le terme demande de
monnaie évoque à la fois un concept et une fonction. Si le concept de la
demande de monnaie relève de la notion d’encaisse monétaire, l’idée d’une
fonction de demande de monnaie résulte de l’interprétation de l’équation
quantitative qui constitue les principales réflexions monétaires.
La
notion d’encaisse monétaire
La demande de monnaie est
une encaisse monétaire désirée. Il appartient à Léon Walras en 1874 d’avoir eu
la première intuition de la demande de monnaie, lorsqu’il emploi l’expression
d’encaisse désirée. Nous trouvons sous la plume de certains économistes
anglo-saxons, le terme voisin de « cash balance » et dans l’œuvre de
M Rueff la notion d’encaisse désirée elle-même.
L’encaisse monétaire d’un
agent est la quantité de monnaie qu’il détient, quelle que soit la raison de
cette détention. La demande de monnaie est donc une demande de détention de
monnaie ; il s’agit de raisonner sur la monnaie détenue et non sur la
monnaie utilisée. Pour parler comme G Bramoullé (1998), lorsqu’un agent utilise
sa monnaie, il l’offre en échange des biens, des services ou des titres qu’il
demande et s’il utilise toute sa monnaie, sa demande de monnaie est nulle. Ce
n’est que lorsqu’il conserve de la monnaie « en caisse » qu’il
effectue une demande de monnaie. Ainsi, l’agent qui retire des billets au
guichet de sa banque pour effectuer un achat n’est pas un demandeur de monnaie :
il transforme sa monnaie scripturale (monnaie par écriture) en monnaie manuelle
ou fiduciaire pour mieux offrir sa monnaie. E James en 1965 va encore plus
loin, pour lui, même si les billets sont empruntés, « l’emprunt suivi
immédiatement d’une dépense ne saurait apparaitre comme une demande pure :
l’offre suit de trop près la demande ». Par contre la monnaie peut être
détenue pour être utilisée plus tard. D’où la monnaie est considérée comme une réserve
de valeur.
La
demande de monnaie est une encaisse nominale ou une encaisse réelle
La demande d’encaisse monétaire
peut être formulée en termes nominaux c’est-à-dire exprimés en unité de compte
(d’encaisse monétaire nominale), ou on peut l'exprimer en pouvoir d'achat
(encaisse monétaire réelle) selon que les agents soient, ou non, soumis au
phénomène d’illusion monétaire.
La
demande de monnaie est une encaisse instantanée ou une encaisse moyenne
Si la demande de monnaie
peut être appréciée à chaque instant, mais la plupart du temps le raisonnement
se fait sur un intervalle de temps au lieu d’un temps bien précis. Dans le cas
d’une analyse de période, la demande de monnaie peut prendre trois acceptions différentes :
l’encaisse disponible en début de période, l’encaisse disponible en fin de période,
ou l’encaisse moyenne sur la période. Cette dernière est l’acception la plus
couramment utilisée, ce qui fait de la demande de monnaie une demande
d’encaisse moyenne. Ainsi, un agent disposant en début de période d’une
certaine dotation de signes monétaires dans laquelle il puise régulièrement
pour effectuer ses dépenses, aura une demande de monnaie sur la période considérée,
même s’il épuise toute sa dotation initiale : sa demande de monnaie sera
donnée par le niveau moyen de son encaisse sur la période.
La demande de monnaie :
encaisse active vs encaisse oisive (thésaurisée)
Dans l’exemple précèdent,
les agents sont censés utiliser complètement leur dotation initiale de monnaie ;
mais il est possible qu’à la fin de la période, il reste une quantité de
monnaie inutilisée. Angell (1937) a alors proposé de qualifier de monnaie
active la quantité de signes monétaires utilisées, et de monnaie oisive celle
qui ne l’est pas. Dans le même d’ordre d’idée, Newlyn (1962) propose ainsi de réserver
l’appellation de monnaie d’active aux signes monétaires utilisées dans les
seules transactions génératrices de revenu. Ce qui permet de soutenir que les
épargnes faites par les agents économiques auprès des institutions financières
ne peuvent être considérées comme de la monnaie oisive.
M.
Abdoulaye CAMARA
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