Et
si le Marché est le seul véritable sauveur de l’EDM ?
Créée un 14 octobre 1960 avec un
capital initial de 15 millions de F CFA, la société Energie du Mali (EDM) n’est
plus que l’ombre d’elle-même. De 12 heures de délestage à près de 18 heures et
même plus pour certaines zones et localités du Mali ; l’EDM, disons-le tout
net n’y arrive plus ! Pour sortir de cette impasse « EDMgate » que
préconisent les théories économiques ?
Justice
sociale et efficacité productive que choisir ?
Comme le dirait l’autre, « il
n’y a rien de nouveau sous le soleil ». Les argumentaires économiques sont
connus. Ils forment deux branches idéologiques. La première défendant la
prééminence de la présence de l’Etat et la seconde soutenant mordicus la supériorité
du Marché.
Si la pierre de touche des pros « plus »
d’Etat est la prise en compte de la dimension justice sociale pour la
fourniture du service, la pierre de touche des pros Marché (ou
« moins » d’Etat) est l’efficacité productive (c’est-à-dire le maximum
de service fourni au minimum de coût économique de production).
Je préviens le lecteur qui commencerait
à se dire pourquoi ne pas chercher à atteindre simultanément ces deux objectifs
de justice sociale et d’efficacité économique. La concomitance des deux
objectifs est quasiment impossible. Au contraire, il existerait une relation de
proportionnalité inverse en les deux objectifs. Ce qui signifie que vouloir
plus de justice sociale conduirait à moins d’efficacité productive et vice
versa.
Pendant que l’idéologie des pros
Etat met l’accent sur la peur de l’Autorité et la moralité des dirigeants pour
l’atteinte de leur objectif, l’idéologie des pros Marché s’appuie sur les
incitations des acteurs et la recherche du profit dans l’atteinte de leur
objectif. Ces deux idéologies dans leurs manifestations les plus extrêmes
conduisent respectivement au Communisme et à l’Ultralibéralisme (libertarianisme).
EDM
une fana de la justice sociale
L’EDM, même ayant connu diverses
répartitions de son capital de sa création jusqu’à la détention de son capital
à 100% par l’Etat malien en 2018 ne s’est jamais départie de son objectif de
justice sociale. Et les résultats engrangés sont connus. De huit (08) localités
desservies en 1961, quarante (40) années plus tard soit en 2000, elle a accepté
d’exécuter un contrat de concession du service public de l'électricité sur un
périmètre de 98 localités. Et en 2004, la société Energie du Mali fournissait
154.000 clients (résidentiels et non résidentiels) en électricité. Est-ce un
résultat satisfaisant ? L’objectif visé par cet article de presse n’est
point d’apporter une réponse à cette interrogation. Ce qui est en ce moment
(juin 2024) une vérité incontestable, c’est que toutes les localités desservies
auparavant conjuguent présentement à tous les temps des modes de conjugaison
l’expression « vivre sans électricité » !
En prenant le fil de mon exposé, une
série de questions retient mon attention: pourquoi durant tout ce temps (de
1960 à 2024) l’EDM n’a pas été capable de proposer un service qui satisfasse
les attentes des clients maliens (ménages, entreprises et administrations
publiques) en termes de qualité, de quantité et de prix d’accès ? Et si l’idéologie
économique – à savoir l’atteinte de la justice sociale – qui sous-tendrait tout
son processus décisionnel de production n’est pas la principale cause de cette
impasse de l’EDM ?
Comme l’EDM est une fana de la
justice sociale, et pour atteindre cet objectif ses principaux leviers sont la
peur de l’Autorité et la bonne moralité des dirigeants. Si un de ces critères
fait défaut ? Logiquement l’atteinte de l’objectif de justice sociale deviendrait
automatiquement problématique.
Je pense sincèrement que le premier
critère « peur de l’Autorité » a foncièrement fait défaut au Mali
depuis mars 1991 à nos jours. Cette peur de l’Autorité à mon avis ne peut jouer
son plein effet et de manière constante que dans les sociétés démocratiques.
Mais jamais dans les sociétés en phase de transition comme le Mali tentant
d’effacer les traces de l’aristocratie (société caractérisée par l’existence
des classes) – pour ne pas dire la dictature – vers une société démocratique
(caractérisée normalement par une égalité des conditions). Ce qui justifie que
de mars 1991 à nos jours cette peur de l’Autorité s’est étiolée inexorablement.
Et l’EDM est pleinement victime de cet état de fait. Cette absence de peur de
l’Autorité ne peut qu’être le terreau fertile servant à l’éclosion au fil du
temps de dirigeants de mauvais aloi au plan moral. Ce qui est logique dans la
mesure où « sommeille en tout Homme un petit voleur ».
Et
si le Marché est la solution
Si l’état social au Mali était
démocratique caractérisée par une égalité des conditions, il serait possible
dans une certaine mesure de continuer à expérimenter l’approche idéologique ciblant
la justice sociale comme principal objectif de production de l’EDM. Car dans un
tel état social, la « peur de l’Autorité » serait susceptible
d’instiller les doses de vertus nécessaires conduisant à une gestion vertueuse
de l’EDM. Ce qui permettrait in fine d’avoir un service qui ne sera certes pas
produit de manière efficace mais ferait l’affaire des clients maliens tout en
instaurant une forte dose de justice sociale.
Malheureusement, le Mali est depuis
mars 1991 en phase transitoire d’une dictature (ayant conduit à un état social
aristocratique hybride) vers un état social démocratique qui est très loin
d’être atteint. Donc, par voie de conséquence, l’idéologie pro Etat ne se
soldera que par des déconvenues cuisantes. Comme celles que les maliens sont en
train de vivre à l’heure actuelle.
Dans un pays ayant un état social
transitoire comme le Mali, je pense que l’idéologie pro Marché semble être la
meilleure. Cette idéologie est neutre quant à son lien intrinsèquement parlant avec
l’état social dans lequel elle est mise en œuvre. Pour le dire autrement, cette
idéologie s’appuyant sur les incitations et la recherche du profit n’a point
besoin d’une peur quelconque de l’Autorité (Etat) pour faire valoir son plein
effet. En d’autres termes, elle peut être considérée comme « la bombe
nucléaire » contre la corruption des dirigeants. Et la prise en compte de
la moralité du dirigeant devient un facteur secondaire. Conformément à son
objectif, la soumission de la société Energie du Mali (EDM) à une telle
idéologie économique permettra d’attirer les investissements (financiers et
physiques) nécessaires à la mise en route de cette société. Ce qui va permettre
indiscutablement d’avoir une fourniture d’électricité de qualité et en quantité
suffisante.
Dans une perspective du basculement
de l’EDM que je souhaite de tous mes vœux vers l’idéologie de l’efficacité
productive, le principe de la concurrence doit prévaloir à tous les étages. Ce
qui m’amène à soutenir une fragmentation importante des trois segments
concourant à la production de l’électricité au Mali tant que faire se peut. La
mise en œuvre d’un tel paradigme doit conduire à ouvrir grandement à la
concurrence le segment de la distribution. Tandis que les segments de la
production et du transport doivent être confiés à deux sociétés distinctes formant
chacune sur son segment un monopole naturel (présence potentielle des économies
d’échelle). Dans ce nouvel environnement ainsi dessiné, l’Etat doit jouer à
fond son rôle d’arbitre en érigeant une autorité de régulation indépendante de
toutes les parties impliquées dans la fourniture du service.
Que deviendra dans cette nouvelle
configuration l’objectif de justice sociale pouvant toujours être défendue par
l’Etat ?
Si l’Etat
jugerait que le niveau des tarifaires établis via le marché est socialement
injuste, il peut user des moyens habituels (les subventions, les mesures de
tarification visant les coûts de production et autres mesures de régulation
hors prix telles que la discrimination tarifaire) dont il dispose pour établir
le niveau de justice sociale qu’il souhaiterait.
L’EDM dans sa forme actuelle – un
monopole étatique –pose avec acuité le problème de sa « propriété ». L’EDM
est victime de cette forme de « propriété » car une chose qui
appartient à tout le monde n’appartient à personne. C’est pour cela que cette
structure doit appartenir à quelqu’un pour qu’elle puisse fonctionner
« normalement » pour le bonheur des maliens. Et l’exemple de la
SOTELMA qui est devenue Malitel (après Moov Africa) est une belle réussite de
transformation d’un secteur souverain moribond en une machine à sou offrant à
ses clients (ménages, entreprises et administrations publiques) des services en
quantité, de qualité et de surcroit à des tarifs concurrentiels.
1 commentaire:
Je partage la même idée que vous tout en mettant l'accent sur la concurrence entre les parties. Et Avec l'idéologie pro marché les deux parties feront tout de leur pouvoir pour donner la quantité minimum d'énergie afin de satisfaire les clients maliens en énergie. À ce titre je propose à l'État intellectuel malien de tenir compte à cette solution efficace pour pouvoir résoudre ce problème énergétique connu sur toute l'étendue du territoire malien car l'énergie fait partie aujourd'hui dans le monde entier l'un des facteurs du développements en terme de croissance économique. Merci à vous mon pédagogue(Madou Cissé)!
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